Le packaging, un vecteur clé d’innovation
Philippe Thuvien
Directeur Packaging et Développement
chez L’Oréal
Le packaging et le design sont aujourd’hui des vecteurs clés de l’innovation dans le monde des cosmétiques. D’autant plus dans le contexte économique mondial actuel qui exige d’accélérer la dynamique d’innovation, en cohérence avec les tendances macro-économiques de notre environnement. Pour rester compétitives, les sociétés cosmétiques doivent innover et gagner en rapidité.
L’univers des cosmétiques doit faire face à une concurrence de plus en plus agressive, qui demande au packaging de participer à la différenciation des produits par des designs attractifs. Notre secteur est également de plus en plus attentif aux coûts. Certes, les marchés émergents, avec leurs millions de nouveaux consommateurs, commencent à voir leurs revenus augmenter, leur permettant de s’acheter des produits cosmétiques, à condition qu’ils soient adaptés à leurs besoins, à leur culture et à leur pouvoir d’achat ! Au contraire, crise oblige, dans les pays développés, beaucoup de consommateurs cherchent à réduire leurs dépenses. Aussi le packaging doit-il permettre aux hommes et aux femmes de la planète d’accéder à la beauté par des réponses produits adaptées à leur marché. Nous vendrons par exemple un shampoing Garnier dans un flacon 400 ml en Amérique du Nord, dans un flacon 250 ml en Europe et dans des sachets de 2,5 ml en Inde, aux Philippines ou dans certains pays d’Amérique du Sud.
Proposer des packagings toujours plus performants
La sécurité de nos consommateurs est une exigence. Elle n’est donc pas négociable. Mais au-delà de ce prérequis, ils attendent de nos produits une véritable valeur ajoutée, c’est-à-dire un supra de performance visible et mesurable et une qualité irréprochable.
Pour ce faire, nous améliorons l’ergonomie de nos produits en développant de nouvelles fonctionnalités comme par exemple une gestuelle plus naturelle, un meilleur confort d’utilisation ou une restitution de formule facilitée. A l’instar du flacon de coloration sans ammoniaque, Olia, élégant et ergonomique, qui permet une application facile. D’autres packagings permettent de « booster » l’effet anti-fatigue de la formule, comme dans le Roll-on yeux de Mennen, avec un effet massant et froid, ou de désincruster la peau en profondeur grâce à un applicateur de nettoyage avec la sensorialité d’un massage pour le « Perfect Clean » de L’Oréal Paris. Les packagings permettent aussi de réaliser des mélanges à la demande, en couplant les formules à un diagnostic afin de personnaliser le traitement, comme dans Fusio-dose de Kérastase.
Répondre aux enjeux de développement durable
Autre préoccupation des marques de cosmétiques : répondre aux enjeux de développement durable, avec des matériaux plus respectueux de l’environnement, qui préservent les ressources fossiles et diminuent les consommations d’énergie. A l’instar des tubes en polyéthylène de Lancôme, des flacons PET de Kiehl’s et des pots en verre recyclé de Biotherm. Nos matériaux seront demain globalement les mêmes que ceux que nous utilisons aujourd’hui. A une différence près : ils ne seront plus issus des énergies fossiles, mais de ressources bio-renouvelables et/ou recyclées. Nous devons également veiller à sourcer de façon responsable nos étuis pliants et cartons (certifiés FSC ou PEFC). Nous avons par ailleurs mis en place une politique de réduction de nos emballages et suremballages, aussi bien au niveau de nos articles de conditionnement entre nos fournisseurs et nos usines qu’au niveau de nos produits eux-mêmes. Et nous nous sommes engagés à réduire nos déchets générés par produits finis de 50 % entre 2005 et 2015, tout comme notre consommation d’eau et nos émissions de CO2. L’usine L’Oréal de Jababeka en Indonésie est, par exemple, certifiée LEED, une norme américaine définissant des règles strictes en matière de conception de bâtiment durable (utilisation rationnelle de l’eau et de l’énergie notamment). D’autres sites de production du Groupe (Settimo Torinese en Italie, Libramont en Belgique, par exemple) se sont fixés comme objectif de fonctionner rapidement avec un bilan CO2 neutre (zéro émission de CO2).
L’industrie cosmétique doit aussi anticiper les attentes réglementaires et médiatiques. La « juste » protection de nos formules est par exemple un axe de travail. La qualité des matières premières, la formulation, les process de fabrication et de conditionnement et les packagings participent à cet objectif.
Trouver des machines les mieux adaptées à chacun de nos besoins
Pour répondre à tous ces enjeux, nous adaptons nos process de fabrication et nos machines de conditionnement. Notre objectif est de trouver les équipements adaptés à nos besoins en performance, qualité et fiabilité. Sur des produits basiques et des productions importantes, il s’agira d’avoir des machines performantes en matière de cadence avec très peu de points de réglage pour fiabiliser le process. Par contre, pour des produits complexes et/ou à haute valeur ajoutée, il faudra privilégier la flexibilité afin de répondre au mieux au souhait des marques en matière d’innovation et de s’adapter à plusieurs produits. Plus nous optimiserons nos délais de mise à disposition des machines et outillages, meilleurs nous serons dans la réactivité et la capacité de produire au meilleur coût. Et, parce que la sécurité des collaborateurs est une priorité pour L’Oréal, chaque investissement fait l’objet d’une analyse de risque sécurité ainsi que d’une réception spécifique sur ce point.
La traçabilité, un facteur clé
La traçabilité de nos produits est réglementaire. C’est un facteur clé pour lutter contre la contrefaçon et le marché parallèle, et protéger ainsi nos consommateurs de l’utilisation de produits cosmétiques contrefaits. Par ailleurs, les parachèvements et les packagings interactifs et multimédias sont de formidables vecteurs d’innovation et de différenciation. Nous sommes donc en veille permanente pour utiliser les solutions de codage et d’authentification les plus adaptées à nos besoins :
• La sécurisation de nos produits : toujours avoir une longueur d’avance sur les « diverteurs » ou contrefacteurs,
• La globalisation des informations et échanges de données en utilisant le potentiel des nouvelles technologies (électronique embarquée, miniaturisation….),
• L’interactivité avec nos clients : leur offrir, là aussi via les nouvelles technologies (smartphone et flash code…), plus de services et d’informations.
Un packaging « intelligent » est un emballage qui permet – au-delà de sa fonction première qui est de protéger, transporter et préserver le produit – d’informer et de conseiller le consommateur, par exemple sur des teintes (maquillage et coloration), et enfin d’être un vecteur de promotion et de publicité pour la marque. Le challenge est de savoir saisir et intégrer les nouveaux moyens de communication (QR code, RFID, encre réactive…) sur nos supports traditionnels : étuis pliants, étiquettes ou sleeve, avec les contraintes de rétraction à maîtriser pour ce dernier.
L’Oréal dépose plus de 70 brevets packaging par an
Pour répondre à toutes ces attentes et contraintes, les marques doivent continuellement innover. Le packaging est donc plus que jamais un vecteur clé de cette innovation. L’Oréal investit ainsi fortement en recherche et innovation, déposant, par exemple, plus de 600 brevets en 2012 (dont plus de 70 brevets packaging). Car c’est à travers l’innovation que le Groupe va parvenir à atteindre l’objectif qu’il s’est fixé : conquérir un milliard de nouveaux consommateurs d’ici dix ans. Il revient à nos départements Recherche & Innovation, et Marketing de développer des produits de grande qualité et de haute performance. Nous venons, par exemple, d’ouvrir un nouveau centre de recherche en Inde, et nous en ouvrirons bientôt un autre au Brésil pour développer des produits correspondant aux attentes locales.
Une innovation collaborative
Afin de renforcer le partenariat avec ses fournisseurs et d’accélérer l’innovation packaging, L’Oréal a, en outre, lancé il y a trois ans l’opération Cherry Pack. Elle permet de faire entrer l’innovation packaging des fournisseurs sélectionnés « au cœur » de l’entreprise, en proposant aux marques de toutes les divisions du Groupe, des innovations « prêtes à l’emploi » ou plus prospectives, répondant à leurs attentes. C’est une sorte d’incubateur interne en somme, au sein duquel les fournisseurs sélectionnés partagent leurs expertises, et imaginent ensemble des manières performantes de délivrer de nouvelles formules, d’apporter des gestuelles et des esthétiques nouvelles. Une bonne manière de tisser à la fois des liens plus étroits avec les fournisseurs et aussi d’accélérer le processus d’innovation.
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